Proposition de Loi : la sécurité n’est pas globale !

Certes, il restera des acquis incontestables du lobby sans pareil du GES auprès des députés et sénateurs dans le cadre des discussions sur la «Loi Sécurité Globale». Mais, car il y a un grand MAIS : il est ô combien juste de relever que la déception du secteur est énorme. Immense même, au regard de l’incapacité dont une énième fois font preuve les Assemblées et il faut aussi l’écrire, les pouvoirs publics, à poser les bases d’une vraie politique publique de la sécurité privée. Encore une occasion -belle cette fois-ci-, ratée.

 

On ne peut pas faire l’économie d’un bilan à nouveau négatif. La garantie financière, pourtant reprise par le «Rapport Thourot-Fauvergue sur le Continuum», a été renvoyée à n’en pas douter aux calendes grecques. C’est le GES lui-même qui l’écrit : «instrument pour garantir donc… la solidité des entreprises : sauf à vouloir que les Urssaf, donc le contribuable, continuent de payer en cas de liquidation abusive».
De quoi donner aux éternels détracteurs de tous poils les mêmes arguments récurrents – qui resteront donc fondés – contre un secteur à dérives multiples. A croire que cela en arrange plus d’un pour raison idéologique ou corporatiste.

Et pourtant faut-il le rappeler : la première proposition visant à instaurer un tel outil d’assainissement et de professionnalisation du secteur date de 1992 et fut signée par Claude Lévy, père fondateur du patronat du métier ! Il vient de nous quitter sans la moindre médaille, autrement méritée que par l’appartenance aux réseaux tenaces qui ligotent l’Intérieur et la sécurité en général. C’est bien à désespérer, d’autant que le contre-argument désormais avancé est celui parfaitement épinglé par le GES de «faux débat sur la chimère que constitue la liberté d’entreprendre érigée comme dogme intouchable et qui serait soit-disant mise à mal par cette mesure qui existe déjà dans plus de 50 secteurs pourtant non réglementés».

 

Lueur d’espoir pour la limitation de la sous-traitance

Même espoir, même punition pour le sujet, lui aussi rebattu, de la limitation de la sous-traitance – sujet cher au Président du Groupe Triomphe Sécurité, trop tôt disparu cet été : Elias Nahra, Vice-Président du GES. Avec tout de même une petite lueur d’espoir qui reste à concrétiser. Voilà une proposition (elle aussi ancienne…) qui, dixit le GES «ne vise qu’à assurer les donneurs d’ordre de la qualité des prestations de services». Et au passage à dénoncer et autant que possible judiciariser la délétère sous-traitance en cascade dont profitent et abusent clients publics et privés mais aussi les prestataires de toutes tailles. La mesure serait réduite au second rang seulement contre le premier demandé et la limite serait de 50% contre 80% demandé !
Je ne m’appesantirai guère plus : la coupe amère est pleine. Sinon pour conclure sur ce que le Président fondateur du CNAPS lui-même, je cite Alain Bauer, propose en accord avec la profession depuis 2012 et qui n’est donc pas encore passé : la publication systématique des interdictions d’exercer prononcées à l’encontre des prestataires contrevenants. Il faudra là aussi attendre son tour, voir 2050 !
A croire encore que d’aucun préfère un secteur privé de la sécurité douteux plus qu’un partenaire de continuum performant.

 

Absence d’une politique publique de la sécurité privée qui a peur de son ombre

 

Mais au sujet du CNAPS, il y a beaucoup plus à craindre. Vraiment, puisque –hors du débat sur la Loi, il est vrai–, c’est la Cour des comptes elle-même qui a mis le vers dans le fruit et l’argument ne manquera pas d’être utilisé tôt ou tard : la présence des représentants du secteur «juges et parties » dans les instances du CNAPS représenterait un potentiel conflit d’intérêt dont la meilleure manière pour l’éviter serait de les en sortir …
On croit cauchemarder sur l’avenir d’une des seules véritables avancées pour le secteur ces dernières années dans le cadre d’une famélique pseudo-politique publique de la sécurité privée qui a peur de son ombre. Et comment ne pas s’y attendre et donc s’y préparer, sachant que par le passé la profession a appris l’instauration d’une taxe CNAPS sans concertation – de même pour sa suppression expéditive –.

Alors que la présence des professionnels représentatifs de la profession au CNAPS, aux CLAC et à la CNAC est comme pour les Prudhommes une garantie – ô combien indispensable aux fonctionnaires et contractuels – d’expertise et que les risques de conflits d’intérêts peuvent parfaitement être jugulés par une charte de déontologie pertinente, on mesure à cet état d’esprit négatif, l’immense chemin qu’il reste à parcourir à la profession pour se faire entendre des pouvoir publics et de la représentation nationale.

Et que dire de l’interprétation d’un préfet sur le fait que la sécurité incendie ne fasse plus partie du Livre VI de la loi de sécurité intérieure ? Et que de ce fait, nos pompiers SSIAP n’ont pas besoin de carte professionnelle et peuvent détenir un casier judiciaire bien chargé pour sécuriser une tour IGH à la Défense. Et pourra-t-on penser aussi un jour au statut juridique des agents de surveillance pour mieux les protéger face aux agressions qui se multiplient ?

 

Quelles leçons peut-on tirer de ce triste bilan ? Clairement que le GES, malgré un changement de braquet remarquable dans son lobby, ne peut en rester là pour véritablement bousculer les choses. Certes, il ne s’agit nullement de retourner la table.
Le sujet de la sécurité est un sujet hyper-sensible. Quel puissant et déterminant lobby faut-il mettre en œuvre pour ne pas attendre de voir passer les lois sur la sécurité et dans 20 ans encore parler de garantie financière ? Voilà la vraie question, le vrai défi face auquel nous laisse cette énième occasion manquée… Vrai sujet pour un Congrès historique !

Pour conclure, y-a-t-il un cadre, un préfet au Ministère de l’Intérieur pour s’intéresser à nous et rendre enfin viable cette activité de la sécurité privée dont on aura tant besoin aux prochaines échéances de 2023 et de 2024 ?

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